17 février 2015

Bohus Fästning : La Porte aux trois Royaumes


Halloj à vous, marrauds très chers lecteurs,




Avant-hier, dimanche 17 février 2015, aura été un grand jour ! Oui car c'était le jour de ma toute première... introduction illégale à l'intérieur d'un bâtiment historique suédois classé... Champagne !
Bohus fästning, une forteresse imprenable aux coeur de la Scandinavie
crédits : slottsguiden.info
Et puis tant qu'à faire ce genre d' "incivilité" (Aucune loi ne prévoit de punition pour ce genre d'acte, ni en Suède, ni en France, pour info...), autant choisir un lieu au patrimoine historique incroyable. Et quoi de plus incroyable pour mon premier acte de "délinquance culturelle" qu'une forteresse imprenable vieille de plus 6 siècles, qui a appartenue tour à tour à la Norvège, au Danemark et à la Suède ?
C'est donc à bord du "Gröna expressen", une sorte de bus-RER, que je me suis embarqué pour un trajet en direction de la paisible ville de Kungälv, 25 mille habitants, à 25 km au nord de Göteborg.
Ligne de bus que je connais bien, pour l'avoir empruntée de nombreuses fois pour aller travailler dans la région, sans jamais m'arrêter toutefois à sa forteresse en ruine et son centre historique, à côté duquel il est facile de passer. Mais on ne me la fait pas à moi !
À force, je connais bien la manière humble, parfois (souvent ?) méconnaissante des faits, qui pousse les suédois à faire bien peu la publicité de lieux historiques ne manquant pas de singularité. Et une chose est sure, ce lieu, n'en manque pas !


Après environ une demi-heure de route, le bus se rapproche de la rive-sud du Nordre älv, un bras du Göta älv, le fleuve sur le bord duquel a été bâtie la ville de Göteborg. C'est à ce moment là, au sommet d'une butte, sur un îlot au milieu du fleuve, autrefois lieu hautement stratégique, que se dressent les ruines de la forteresse de Bohus, tranchant de manière insolite avec le paysage vallonné et boisé qui caractérise cette région de la Suède. C'est par cette même île, reliée de part et d'autre par des ponts, que passe mon gröna express (Express vert), contradictoirement entièrement bleu comme tous les bus de Göteborg.
Se rendre à Kungälv à bord du "gröna expressen", l'express vert tout bleu
Crédit : Jonathan Rydberg
Une fois descendu à l'arrêt "Fars Hatt" (Le chapeau du père), du nom de la seule tour encore debout, je me mets ainsi en route pour la forteresse. Le temps est maussade, et le promeneur rare et bien assez vite, rentré chez lui. Tout autour du fort cependant, la nature est foisonnante et invite à la promenade. Le sol alentour est jonché de débris de roche, plus ou moins gros, mais restes évident du passé de refuge de centaines d'habitants, vivants sous la protection du fort. Des panneaux d'information disposés ca et là, indiquent (En suédois seulement, sorry guys) que les débris de roche faisant face à l'entrée principale des ruines sont les restes de l'ancienne église de la bâtisse, ainsi que du vieux cimetière. En faisant le tour des remparts, je constate en effet que quelques bris d'os  sont visibles à même le sol.
Le parc verdoyant du fort
Et des ruines et surtout, des squelettes, il est tout à fait raisonnable de penser que le sol de l'île en est jonché, tant le passé de la forteresse est tumultueux !

Aggrandi et amélioré au cours du temps, le fort de Bohus est tout d'abord entré en fonction en 1308. Sa construction avait été ordonnée par le roi Håkon Hålägg ("Longue jambe") de Norvège, pour protéger l'extrême sud de  la province de Bohuslän, à laquelle il a donné son nom ! À l'époque, les frontières des jeunes royaumes de Suède, de Norvège et de Danemark sont bien différentes des frontières actuelles : La Suède finissait alors bien plus à l'est du "Götaland", concentrée sur la Baltique (La Finlande en étant la partie intégrante jusqu'en 1809), tandis que les régions sud et sud ouest de la Suède actuelle, et correspondant au Bohuslän, au Värmland et au Skåne, faisaient partie des royaumes de Norvège et de Danemark (En plus de la province du Jämtland, plus au nord).

Ce qui faisait alors de Bohus fästning, l'ultime frontière entre la Suède d'un côté, l'extrême sud de la Norvège, non loin de l'extrême nord du Danemark, de l'autre : 
Le Nord au 14e siècle
Wikipedia
La région était alors au centre de tous les nombreux conflits entre les 3 royaumes. D'abord entre le Danemark et la Norvège ou la Suède, puis entre le Danemark et la Norvège, soumise à celui-ci, contre la Suède. Et le Bohus fästning en particulier, formant un véritable verrou du fleuve Göta, alors très important pour le commerce. Entre le 14e et le 17e siècle, le fort fera des envieux, et subira ainsi de très nombreux sièges de la part des Suédois, des Danois, puis, une fois la région du Bohuslän obtenue par la Suède suite au traité de paix entre la Suède et le Danemark-Norvège, des Norvégiens, qui voulaient, et on les comprend, récupérer ce qui avait alors déjà bien mérité son statut de "château le plus fort de Scandinavie", même s'il n'a que rarement permis la protection de la ville de Kungälv elle-même, détruite très régulièrement par les troupes de siège.

Le procédé de leur siège de 1678, au cours de la guerre de Scanie (Skånska kriget), qui restera le dernier subit par le fort, et probablement le plus osé d'entre eux, est décrit comme sans pitié : Le 6 juin, après avoir ravagé une bonne partie de Kungälv, une troupe forte de 10 000 soldats norvégiens, appuyés par une forte artillerie, ont commencé à pillonner le fort, défendu par 384 soldats seulement, qui ont bien entendu répliqué à l'attaque. Voyant que les occupants de la forteresse ne cèderaient pas facilement, les Norvégiens, appuyés par des troupes Danoises décident alors d'utiler leur "arme ultime", des "leede, förgiftede stinkpotter" en Danois dans le texte. Comprenez des sacs contenant le contenu de latrines, un concentré de germes, dont le but était d'affaiblir les défenseurs en les rendant malades. Mais même cette tactique ne fut pas suffisant, alors les Norvégiens se mirent après quelques jours à lancer un tas de bombes, des centaines, contre le fort, et finirent par créer une brêche dans les remparts. Mais les Suédois étaient particulièrement aware ("medvetna") ce jour-là, et repoussèrent l'envahisseur en causant moultes pertes... Finalement, le fort tint miraculeusement jusqu'à l'arrivée de renforts, et les Norvégiens se retirèrent. Peu après, la guerre de Scanie se conclut en un match nul, où la Suède conserva la Skåne, le Bohuslän et toutes ses autres conquêtes précédentes, qu'elle avait patiemment grignotté au Danemark et à la Norvège. 
La Suède en 1679... "Beaches" ! 8-)
Wikipedia
Les nouvelles frontières se trouvant alors "définitivement" fixées, le fort de Bohuslän, qui avait au cours de son histoire abrité des rois, accueillis la signatures de traités majeurs entre les 3 royaumes scandinaves, perd son rôle stratégique de garde-frontière et tombe rapidement en désuétude, devient tour à tour résidence du gouverneur de la région, prison, puis, ruine et matériau privilégié pour la construction de Ny-Kungälv, qui est déplacé un peu plus au nord, et dont le centre historique ne manque pas de charme !

Une forteresse vraiment imprenable donc... Certes, jusqu'à ce fameux Dimanche 17 février de l'an de grâce 2015 donc, date à laquelle un jeune fransos, qui n'en rajoute pas des tonnes, a réussi, à la tombé de la nuit, et armé de ses maigres talents en escalade seulement,, à se rendre seul maître du fort, fermé à la visite jusqu'à mai prochain, et, qu'il a pu visiter librement et surtout, apprécier la vue incroyable qu'il offre. Et pour une raison qui lui échappe, il était totalement dépourvu de garnison (Concierge ?). La Suède, c'est plus ce que c'était...


/Nicolas


Bohus fästning et Kungälv de nos jours
slottsguiden.info

-Site officiel du Bohus fästningwww.bohusfastning.com

-Pour les suédophones qui veulent en savoir plus sur l'histoire du fort: www.slottsguiden.infowadbring.com/historia
8 février 2015

Ett halvår


Île d'Öckerö, dans le Nord de l'archipel de Göteborg (Göteborgs skärgård)
credits : Nicolas Martinez

Celà fait pas loin de six mois... Ett halvår (Une "demi-année", un semestre). Et c'est aussi le moment pour moi de faire une petite rétrospective de mon temps passé à la ville "rosa" du Nord qu'est Göteborg...

Ett halvår déjà, que j'ai fait le pari, improbable, mais réalisable, en théorie du moins, de retenter l'expérience suédoise, deux années entières après avoir quitté le sol du pays, pour raisons de sentiments mitigés, et une impression de ne pas avancer dans la direction souhaitée (Administrativement parlant, entre autre).

Ett halvår, qui a connu son lot imprécédenté de mésaventures et de petites catastrophes du quotidien, faisant de ce temps la période la plus difficile de ma courte vie, et ce, à l'endroit précis où j'avais en toute liberté fait le choix de vivre, étudier.

Ett halvår de petits combats personnels menés dans mon coin, dans Göteborg, une ville que je ne connaissait pas, deuxième ville d'un pays que je ne reconnaissais que peu. Trouver un travail, étudier, trouver un logement stable, manger à sa faim... Réussir tout les exams du semestre, malgré tout !

Ett halvår de défis, de "kamp för livet" ("combat pour la vie"), où pour la toute première fois de ma courte existence, ma réussite était vitale.. Avec, en plein milieu, Jultiden (Noël), le moment de l'années où je fais en sorte, depuis ma naissance, de toujours être présent auprès de ma famille. Jusque cette fois-là, où pour la première fois depuis mon expatriation en Scandinavie, il y a plus de 4 ans de celà, je n'en ai pas la possibilité. Me faisant réaliser d'un coup d'un seul le retournement de situation, l'ironie de ma situation : De désespéré d'avoir dû quitter la Suède jusqu'à il y a peu, voilà que j'en était à présent devenu le captif non consentant.

Ett halvår au bout duquel voilà que j'ai pris conscience que mon atterrissage en terre suédoise, en ligne droite depuis l'Islande, et pour lequel j'avais toutes les raisons de croire qu'il se passerait bien, s'était transformé en atterrissage sous un blizzard sibérien avec 3 des 4 réacteurs en panne. Que me dit alors ma logique, un moment vascillante, à présent à peu près rétablie ? Que dans ces cas-là, un détournement du vol vers un aéroport où le temps est plus propice à un atterrissage d'urgence. D'autant que les réserves de carburant viennent à manquer... 
Mais bon, les vols plannés sur 50 nautiques à bord d'un vieux avion cargo tchétchènes, ca me connait apparemment ! Alors, à defaut d'en savoir plus, me voilà bientôt parti pour l'Ouest (De la Scandinavie, bien sûr), où de nouvelles aventures m'attendent, avant d'accomplir un nouveau tour de piste en septembre 2015 : les études n'attendent pas.

Vi syns!

Nicolas